« Lutter contre le Sida est avant tout une interpellation personnelle avant d’être collective »
Rencontre avec André Mama Fouda, Ministre de la Santé Publique à l’occasion du « Mois camerounais contre le Sida ».
- Cette année, nous célébrons la 3ème édition du Mois Camerounais contre le Sida. Comment évaluer le chemin parcouru jusqu’ici ?
Tout d’abord je voudrais remercier tous les acteurs engagés aux côtés du Gouvernement pour la lutte contre le Sida. Nous sommes effectivement rendus à la 3ème édition de l’accélération de la riposte contre et le Sida que nous avons dénommé : « Mois Camerounais contre le Sida ». Les résultats acquis nous confortent dans notre démarche. Lors de la 1ère édition, 55 108 personnes ont été testées dans l’ensemble du pays par les Unités Mobiles. Parmi elles, 1134 ont été déclarées séropositives. 628 ont été référées et, 128 mises sous traitement. Lors de la 2ème édition, le rapport présenté indique que 68 796 personnes ont été conseillées et que 68 726 ont effectivement fait le test de dépistage du VIH. Parmi elles, 1371 ont été testées positives. Sur les 1371 personnes, 234 étaient déjà sous traitement. Les 1137 restants ont été référées et 533 mises sous traitement pendant le Mois Camerounais. Vous remarquez donc que la courbe de progression est ascendante, que ce soit en terme de prévention que la prise en charge des personnes testées positives.
- Cette année encore la jeune fille est à l’honneur à travers le thème : « Connaître son statut sérologique » et le slogan « Protégeons la jeune fille » est-ce à dire que les actions mises en œuvre en direction d’elle n’ont pas atteint leur objectif ?
Le thème arrêté par ONUSIDA pour la célébration de la Journée Mondiale de lutte contre le Sida est « Connaître son statut sérologique ». Il s’agit de répondre aux engagements pris par notre pays dans le cadre des grandes orientations internationales en matière d’accélération de la riposte contre le Sida. Le slogan « Protégeons la jeune fille » vient à la suite d’une réflexion engagée par l’ensemble des acteurs de la lutte après la présentation des résultats de l’enquête auprès des ménages pour l’évaluation de l’impact du VIH au Cameroun (CAMPHIA) qui met la jeune fille au premier rang de la problématique des nouvelles infections à VIH. Malgré les réponses aux besoins diversifiés des jeunes en matière de lutte contre le VIH et le Sida, l’on constate malheureusement que les résultats concrets et palpables ne suivent pas toujours dans cette cible.
- Selon l’enquête CAMPHIA, l’incidence du VIH chez la jeune fille a augmenté. Qu’est-ce qui selon vous justifie cela ? et quelles sont les mesures mises en place par le Ministre de la Santé pour inverser la tendance ?
Cette enquête montre effectivement que le nombre de nouvelles infections dans la tranche d’âge 15-24 ans est en nette augmentation. Sa justification et les solutions probables pour y remédier ne peuvent être trouvées que dans un cadre de concertation entre toutes les parties prenantes. Toutefois, nous savons que la jeune fille est confrontée aux violences physiques et psychologiques, à la sous-scolarisation, les mariages précoces et/ou forcés, la marginalisation, l’excision, le lévirat, les inégalités fondées sur le genre, … Parfois, elle est la proie facile de certains hommes à la recherche des sensations fortes toutes particulières.
La lutte contre le VIH et le Sida est organisée suivant une approche décentralisée et multisectorielle. Le Comité National de lutte contre le Sida est l’organe de coordination de cette lutte. Pour trouver une solution à la problématique de la vulnérabilité des jeunes, une conjugaison des efforts de tous les départements ministériels ayant en charge leur encadrement et les acteurs intervenant auprès de cette cible est nécessaire. C’est ce que s’attèle de mener depuis un certain temps, le CNLS et tous ses partenaires.
- Comment est-ce que chaque jeune pourrait contribuer à sa manière à la célébration du Mois Camerounais contre le Sida ?
Lutter contre le sida est avant tout une interpellation personnelle avant être collective. Les jeunes doivent, chacun à son niveau, se donner les moyens de prendre en main, son propre destin pour barrer la route. Pour cela, il est utile de repousser le plus loin possible les premiers rapports sexuels, de tourner le dos à la vie facile caractérisée par la recherche des « sponsors », d’éviter les fréquentations inutiles, d’éviter la consommation des boissons alcoolisées et des drogues, utiliser systématiquement le préservatif en cas de rapport sexuel, être fidèles à un partenaire avec lequel vous avez préalablement fait un test de dépistages. Comme nous le savons tous, connaître son statut sérologique permet à un jeune séronégatif de préserver son statut négatif, et donner les conseils à d’autres jeunes de son entourage. S’il est déclaré séropositif, il pourra bénéficier d’une prise en charge gratuite et ainsi, éviter de contaminer d’autres personnes et de nombreuses maladies opportunistes. Telle pourra être la contribution des jeunes à la célébration du Mois Camerounais.