Les violences sexuelles faites aux femmes
Anita NGOO SOONO, anthropologue au Réseau National des Associations des Tantines (RENATA), présente les types de violences subies par les jeunes filles.
Quels sont les types de violence observés le plus chez les jeunes filles ?
Tout d’abord, le repassage des seins. C’est le fait de masser les seins des jeunes filles dont les seins commencent à se développer. Comme outils utilisés pour le massage nous avons la pierre à écraser, le pilon, la spatule et même des fourmis. Ensuite, le massage post-partum : cette pratique consiste à masser, avec de l’eau chaude, le ventre de la jeune fille qui vient d’accoucher. Ceci, selon les mamans qui le font en général, pour « faire sortir l’eau sale » du ventre de la fille.Il s’agit des pratiques traditionnelles observées dans toutes les régions du Cameroun.
Autres violences envers les jeunes filles, l’excision pratiquée beaucoup plus dans les régions du Sud-ouest et du Nord. C’est une mutilation génitale qui consiste à l’ablation partielle ou totale du clitoris et des petites lèvres du vagin, et quelquefois, des grandes lèvres. Elle peut se décliner en clitoridectomie, qui est une ablation totale ou partielle du clitoris. Autre mutilation génitale, l’infibulation. C’est un rétrécissement de l’orifice vaginal. Elle est pratiquée chez les petites filles en général dans le but de les empêcher d’avoir des rapports sexuels. Elle s’accompagne de la desinfibulation qui consiste à sectionner la cicatrice issue de la suture formée par l’accolement des grandes lèvres sur la ligne médiane afin de permettre l’accès à l’orifice externe du vagin. Cette pratique a pour conséquence que la fille est en quelque sorte poussée à avoir des rapports sexuels vaginaux. Sans oublier les violences domestiques : c’est-à-dire les relations sexuelles forcées, les mariages forcés, le viol, les restrictions et les pressions familiales, et les discriminations diverses.
S’agissant des séquelles physiques de certaines violences ?
Il y en a plusieurs. Pour le repassage des seins l’asymétrie (des seins avec des formes ou des volumes différents), des cicatrices issues des brûlures, des douleurs mammaires, l’écoulement du lait, des seins de très petite taille, des démangeaisons, et même le cancer du sein. Des douleurs physiques atroces, un ventre flasque, des vergetures et des noirceurs sur le ventre sont quelques conséquences du massage post-partum. Le viol peut entrainer des Infections Sexuellement Transmissibles, des grossesses précoces et non désirées. Quant aux mutilations génitales, des séquelles psychologiques sont également observées :la frigidité, le rejet du sexe opposé qui sont des conséquences du traumatisme subi par la fille. Ou pire, la frivolité, la prostitution, l’abandon des études et le suicide qui résultent de l’abandon et du rejet par les familles de la fille.
Comment faire face à toutes ces violences ?
Dans le cadre de nos activités de prévention de ces dangers, le RENATA a initié en 2012, le projet « BACK UP », avec le slogan « Non et trahir » qui consiste à inciter les petites filles de l’école primaire à refuser et à dénoncer leurs bourreaux, en cas de violence. Et pour les jeunes filles victimes, elles doivent se tourner vers des structures compétences pour bénéficier un soutien moral et psychologique. « Insertion des filles-mères dans le circuit scolaire » est également un projet qui accompagne les jeunes filles-mères désireuses de poursuivre leurs études. Cet accompagnement consiste en la fourniture des moyens financiers, matériels et didactiques. Par ailleurs, les autres filles victimes peuvent trouver dans nos structures un soutien moral et un suivi psychologique, à travers notre programme « santé mentale ».Les aider à surmonter ce traumatisme en est l’objectif principal. Pour les filles qui subissent des pressions diverses, il est important de briser le silence. Surtout, ne jamais se dire que « ça va passer », ou encore réagir par la violence contre son bourreau. L’assistance d’un ainé, d’un éducateur et d’un enseignant est indispensable, quant à la procédure à entreprendre pour mettre fin à la situation.
Propos recueillis par Joël Manga Kede